L'analyse des facteurs internes

Commençons par l'analyse des deux facteurs internes que nous avons sélectionnés. Le tableau 2 résume les résultats de cette première analyse statistique.

Tableau 2 : Analyse interne de étaient vs sontaient

Polarité du verbe

Étaient

Sontaient

Total

p

N

%

N

%

N

Verbe [+ positif]

114

35,6

216

64,4

330

0,005

Verbe [+ négatif]

23

59

16

41

39

Total

137

37,1

232

62,9

369

Statut du verbe

N

%

N

%

N

p

Copule

31

32

66

68

97

0,271

Auxiliaire

106

39

166

61

272

Total

137

37,1

232

62,9

369

Avant d'examiner les résultats de cette première analyse, il convient de décrire le tableau 2, afin de nous assurer de bien comprendre ce qu'il présente.

La première colonne indique le facteur interne concerné : 1) le verbe au positif vs le verbe au négatif et 2) la copule vs l'auxiliaire. La seconde colonne fournit le nombre d'occurrences de la forme standard étaient ainsi que les pourcentages pour chaque facteur. La colonne 3 donne les mêmes informations pour la forme vernaculaire sontaient. La colonne 4 indique le total d'occurrences pour chaque facteur (par exemple, nous avons recueilli dans le corpus 330 occurrences de étaient + sontaient au positif, contre 39 au négatif). Enfin, la colonne 5 fournit l'indice p, permettant de savoir si la différence entre les facteurs est significative ou non. Cet indice p a été obtenu à l'aide d'un test de Fisher (et non pas d'une analyse Goldvarb). Pour que la différence entre deux catégories soit significative, l'indice p doit être inférieur ou égal à 0,05. Plus il sera inférieur à 0,05, plus la différence entre les deux variables sera importante.

Le tableau 2 nous fournit plusieurs informations intéressantes. Tout d'abord, dans le cas du facteur interne verbe [+ positif] vs verbe [+ négatif], les deux formes étaient et sontaient semblent être distribuées de façon quelque peu complémentaire : étaient est employé dans des propositions positives dans 35,6% des cas vs 64,4 % pour sontaient et dans des propositions négatives dans 59% des cas vs 41% pour sontaient.

Pour nous assurer que la différence dans l'emploi des deux formes est significative, nous avons effectué un test de Fisher. La valeur que nous avons obtenue est de 0,005. En d'autres termes, l'utilisation de étaient est significativement plus fréquente au négatif, et sontaient est significativement plus utilisé que étaient lorsqu'il est positif. Cette distribution rappelle celle du futur périphrastique et du futur simple en français québécois, car comme nous l'avons précisé ci-dessus, le futur périphrastique est davantage utilisé dans un syntagme verbal positif alors que le futur synthétique est significativement plus utilisé dans un syntagme verbal négatif.

Pour ce qui est de l'opposition copule vs auxiliaire, les résultats obtenus sont nettement différents. En effet, la variation entre les deux formes ne semble pas dépendre de ce facteur interne. On note que sontaient est employé très majoritairement dans chacun des cas. La forme est utilisée dans 68 % des cas où son statut est celui de copule, mais aussi dans 61 % des cas où son statut est celui d'auxiliaire. L'indice de signification p est nettement supérieur à 0,05 puisque sa valeur est de 0,271, ce qui confirme que le statut grammatical de la forme sontaient n'est pas un facteur interne discriminatif.

Sur les deux facteurs internes que nous avons observés, seule l'opposition verbe positif vs verbe négatif se révèle donc significative. Passons maintenant à l'analyse des facteurs externes.