La variation phonétique

La variation phonétique est directement rattachée à la notion d'accent. Elle touche ce qu'on appelle les phonèmes qui représentent les plus petites unités de son dénuées de sens. Par exemple, un Parisien se distingue très facilement d'un locuteur natif du sud de la France ou encore du Québec, car la prononciation de ces derniers est différente de celle des habitants de la capitale française. Prenons l'exemple du mot « samedi ». Il sera prononcé différemment par les trois locuteurs :

- à Paris « samedi » est prononcé généralement [samdi] :

Exemple de prononciation à la française
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- dans le sud de la France, on entendra généralement le E caduc comme dans [samədi] :

Exemple de prononciation du sud de la France
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- au Québec, on entendra généralement l'assibilation (c'est-à-dire le passage de la consonne à la voyelle suivante réalisé par une sifflante, comme dans [samdzi]) :

Exemple de prononciation québécoise
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Dans certains cas, les différences peuvent être moins faciles à déceler, et bien que l'on l'on puisse distinguer l'accent du Pays Basque de l'accent marseillais, une personne qui n'est pas familière avec ces deux variétés aura naturellement tendance à les rassembler sous un même ensemble, en dépit des différences linguistiques qui les séparent. À ce sujet, l'excellent site du projet PFC (Phonologie du français contemporain) offre plusieurs exemples d'accents que l'on retrouve en France, mais aussi au Sénégal et sur l'île de la Réunion.

Chevillet (1991, p. 20)[4] souligne que les différences de prononciation, et donc d'accent, peuvent relever de la phonétique ou de la phonologie : « En schématisant à l'excès, on dira qu'une différence phonétique est un accident de surface n'ayant aucune répercussion sur le système, alors qu'une différence phonologique concerne l'organisation du système, en profondeur. » On considère, en général, qu'il existe trois types de différences :

- Les différences réalisationnelles ;

- Les différences distributionnelles ;

- Les différences d'inventaire ;

Voyons ensemble ce que chacune des catégories recouvre.

1) les différences réalisationnelles ne touchent pas l'organisation des phonèmes d'une variété. Par exemple, en français standard international, le R est prononcé [ʁ] (une fricative uvulaire) quelle que soit sa position (à l'initiale comme dans « rapide » [ʁapid], à l'intervocalique comme dans « durée » [dyʁe] ou en position finale comme dans « lire » [liʁ]), alors que dans certaines variétés locales, il sera prononcé [r] (c'est-à-dire roulé avec la pointe de la langue contre les gencives supérieures) dans les mêmes contextes linguistiques.

2) les différences distributionnelles concernent l'organisation des phonèmes. Chaque variété possède les mêmes phonèmes, mais ces derniers ne sont pas organisés de la même façon. En d'autres mots, ils n'apparaissent pas dans le même contexte linguistique. Par exemple, en français standard de France, le A est prononcé [a] en position finale (comme dans « Canada » prononcé [kanada]), alors qu'en français standard québécois, le A final est généralement prononcé [ɑ] en finale (comme dans « Canada » prononcé [kanadɑ]).

3) les différences d'inventaires sont identifiées lorsque deux variétés se distinguent par le fait qu'elles ne possèdent pas les mêmes phonèmes. Par exemple, en français standard de France, la voyelle nasale [ɛ̃] a, en grande partie, remplacé la voyelle [ɶ̃], comme dans « un lapin », généralement prononcé [ɛ̃lapɛ̃], plutôt que [ɶ̃lapɛ̃]. La voyelle nasale [ɶ̃] existe toujours en français standard québécois et on prononcera donc « un lapin » [ɶ̃lapɛ̃] en faisant une distinction très nette entre la voyelle nasale arrondie [ɶ̃] et la voyelle nasale écartée [ɛ̃]. On dit alors que les deux variétés ne possèdent pas le même inventaire de phonèmes.