Les amérindianismes
Nous renvoyons le lecteur à la section suivante pour une discussion sur les emprunts à la langue anglaise en français laurentien. Précisons toutefois que les anglicismes sont plus nombreux dans les parlers français de l'Ouest qu'au Québec – même si nous ne disposons d'aucune étude qui nous permettrait de chiffrer le taux réel – du fait que tous les locuteurs, ou presque, sont bilingues en français et en anglais, ce qui n'est pas nécessairement le cas au Québec. Aussi, la présence de l'anglais est de loin beaucoup plus importante dans l'Ouest canadien qu'il ne l'est au Québec. Il est intéressant de noter, par contre, que Gaborieau (1999)[1], qui se veut un lexique du français tel que parlé au Manitoba, inclut un très grand nombre d'anglicismes (emprunts ou calques), dont plusieurs ne sont pas nécessairement connus au Québec, mais qui sont également connus et utilisés dans les autres provinces de l'Ouest, par exemple « agent de station » ‘chef de gare', « allowance » ‘allocation', « awning » ‘auvent', « canister » ‘boîte, contenant', « clove » ‘clou de girofle', etc.
Le français laurentien, et par le fait même les parlers de l'Ouest, ont également emprunté aux langues amérindiennes, surtout, mais pas exclusivement, celles de la famille algonquienne : « caribou » ‘renne d'Amérique' et « babiche » ‘lanière de cuir' du micmac, « achigan » ‘perche noire' de l'ojibwé, « atoca » ‘canneberge' et « ouaouaron » ‘grenouille bœuf' du huron, « ouananiche » ‘saumon d'eau douce' de l'innu (montagnais). Comme on pouvait s'y attendre, le nombre d'emprunts aux langues algonquiennes (surtout le cri et l'ojibwé) est plus élevé dans le français des Métis que dans les autres variétés de français du Canada et plusieurs de ceux-ci ne sont utilisés que par les Métis eux-mêmes, par exemple : « chicaque » (< cri) ‘moufette', « patiche » (< cri) ‘repas mal préparé', « toto-chapouille » (< cri) ‘lait, petit lait', (temps de) « cayoche » (< cri) ‘autrefois', « pisenne » (ou bisenne) (< assiniboine) ‘gaufre', « panatchâne » (< cri) ‘oiselet', « goémin » (< saulteux?) ‘personnes nées le même jour mais pas la même année' ou ‘personne ayant le même prénom', etc. ( Papen, 2012[2])
D'autres termes bien connus tels que « tobaggan », « tipi », « mocassin », « tomahawk », etc. sont effectivement aussi des amérindianismes, mais ils ont été empruntés à l'anglais qui lui, les a empruntés à diverses langues du Nouveau Monde.